Ce 5 juillet marque la fin de la carrière du lanceur spatial européen Ariane 5. Entré en service en 1996, l’engin a su se construire une réputation de fiabilité à toute épreuve, jusqu’à devenir la référence dans le domaine. Pour sa dernière mission, Ariane 5 doit propulser en orbite deux satellites militaires, allemand et français. Retour sur l'histoire d'un des plus grands succès de l'aventure spatiale.
On voit Ariane qui s’élève, elle est suivie par le télescope de l’île Royale, sur les Îles du Salut. Ce 4 juin 1996, depuis un centre spatial guyanais à Kourou, Christian Sotty commente sur RFI le vol inaugural d’Ariane 5. Tout se passe bien jusqu’à la 37e seconde : et d’un seul coup. Oh ! Ariane a explosé ! C’est terrible, c’est terrible. Tout s’arrête… .
C’est un lancement qui était très médiatisé, se souvient Jean-Marc Astorg, aujourd’hui directeur de la stratégie du Centre national d’études spatiales (Cnes). On l’attendait depuis une dizaine d’années et l'on avait été imprudents dans la communication. Nous avions fait beaucoup de publicité sur de fait qu’Ariane 5 devait être un lanceur fiable. On avait oublié de dire que ce sera un lanceur fiable, quand il sera au point !
Officiellement lancé en 1987, le programme devait succéder à Ariane 4, le lanceur qui avait déjà gagné sa réputation de fiabilité. Mais à l’époque, des satellites à lancer sont de plus en plus lourds, et réclament donc un engin plus puissant : Ariane 5. Le projet se concrétise donc en juin 1996 avec cette issue malheureuse pour son vol inaugural.
Il aura donc fallu 17 mois pour que les équipes s’en convainquent et pour revoir le lanceur sur son pas de tir ELA-3 au centre spatial guyanais. Les débuts de carrière d’Ariane 5 restent néanmoins toujours compliqués. La seconde mission, en octobre 1997, se solde par une semi-réussite ou un semi-échec, c’est selon : l’orbite est atteinte, mais ce pas la bonne. Même résultat en 2001 pour le dixième vol. Enfin, le 11 décembre 2002, l’Atlantique reçoit les débris du lanceur : Le moteur poussait de travers, ça a déséquilibré l’étage qui a fait des loopings, on a perdu l’ordinateur de bord. Quand on a vu que la mission était complètement perdue, on a détruit le lanceur, se remémore Pascal Noir, du Cnes. Cette 17e mission reste aujourd’hui encore dans tous des esprits. Il s’agissait en effet d’un échec majeur, puisqu’il concernait le premier vol de la nouvelle version plus puissante du lanceur, Ariane 5 ECA. Ça été quelque chose de très très lourd, soupire Pascal Noir.À l’inverse du vol inaugural, où c’était l’esprit pionnier, là, c'était difficile. Le monde avait changé, il y avait un côté politique. Si le vol suivant n’avait pas été réussi, c’était la remise en cause du programme. La filière Ariane était en danger.
C'est ainsi que le 12 février 2005 que la deuxième Ariane 5 s’élance vers le ciel. Un lancement qui se passe comme dans un rêve : Quand on marchait dans les rues de Kourou après, on se sentait comme des supporters après un match important. Et puis on finit dans la piscine qu’on a résumé à un bête problème informatique, rappelle Dominique Bajeux, aujourd’hui retraité, et qui a suivi toute la carrière d’Ariane 5, du Cnes, à l’industriel Arianegroup. En fait, c’est bien plus compliqué. C’était lié à un équipement la centrale inertielle, qui avait été développé pour Ariane 4. La manière dont cet équipement fonctionnait n’avait pas été bien perçue dans le contexte d’Ariane 5. Le bug a été résolu en quelques semaines. Mais nous nous sommes posés des questions, si on avait laissé passer d’autres problèmes. Quand on fait l'essai, on le veut représentatif. Mais l’est-il vraiment ? Il faut le démontrer.